COP26 - Comment les lobbies sapent toute ambition climatique
Vous vous demandez peut-être pourquoi, alors même que les énergies fossiles sont les principales contributrices au dérèglement climatique, les chefs d'états dans leurs divers engagements pris depuis lundi et le début de la #COP26 en parlent à peine ?!
C'est pourtant relativement simple : les industries des énergies fossiles, ceux dont le fonds de commerce reposent sur les activités destructrices du climat, sont partout dans nos institutions... jusque dans les instances internationales de discussion autour de sa préservation, comme les COP !
Alors certes, à Glasgow, les organisateurs n'ont donné de rôle “officiel” dans les négociations ni à TotalEnergie, ni à Shell ou RWA... et c’est une première ! Mais les lobbies des fossiles arrivent malgré tout à jouer de leur influence.
Les organisateurs britanniques ont ainsi engagé le Boston Consulting Group comme “partenaire conseil” de la COP, alors même que l’entreprise conseille également 19 des 25 plus grosses compagnies pétrolières du monde. Le conflit d’intérêt est évident ; et pas sans rappeler la mission octroyée par la Commission européenne à BlackRock, l'un des plus grands détenteurs d'actifs fossiles du monde, pour rédiger les règles devant s'imposer aux banques pour le climat... Vous croyez rêver ? Ce n'est pas tout !
Car les lobbies des fossiles mettent aussi à profit leurs liens étroits avec les représentants gouvernementaux pour saper toute avancée positive pour le climat. Selon Corporate Europe Observatory et d’autres associations, en Europe, plus de 70 représentants officiels de l’UE ou de ses Etats membres venaient de l’industrie fossile et de ses lobbies. Le Rapport comptait également 568 réunions entre la Commission européenne et les lobbies fossiles dans les deux dernières années. Côté privé, ce n'est pas mieux : une enquête du media DeSmog a révélé que 65% des directeurs ou directrices de grandes banques européennes ont des liens avec les industries des fossiles... Et attendez encore un peu :
Depuis lundi, et le lancement de la COP26, les témoignages se succèdent sur la place occupée par les lobbies dans les négociations.
Alexandra Villasenor, activiste pour la justice climatique, raconte sur twitter le déroulement réel de la COP : les représentant.e.s de la société civile n’ont pas le droit d’entrer dans les espaces de négociations, où ils devraient jouer leurs rôles d’observateurs, tandis que les lobbies des fossiles, présents en force, se voient offrir des places d'honneur dans les pavillons officiels (comme l’entreprise pétrolière Santos invitée au pavillon Australien), ou sponsorisent directement la COP (comme la banque JPMorgan, banque qui investit le plus dans les énergies fossiles et sponsor du Resilience Hub, un espace de conférence au cœur du site des négociations). Certains témoignages de militant.e.s racontent même que les lobbyistes sont tirés de la longue file d’attente d’entrée pour passer devant tout le monde lorsqu’ils ont des rendez-vous.
Hier (Mercredi 3 novembre), les militant.e.s d’Extinction Rebellion manifestaient devant le Glasgow Royal Concert Hall pour dénoncer le sponsoring de la COP par les plus grandes multinationales, celles-là mêmes qui sont les premières responsables du changement climatique. Comme Google, l’un des sponsors de la COP, qui a émis pas moins de 20 millions de tonnes de carbone depuis 2007 (Source : Mediapart).
Mais le champion toute catégorie du greenwashing à la COP, c’est Jeff Bezos, ancien PDG et toujours premier actionnaire d’Amazon, invité à intervenir en plénière. Arrivé en jet privé à Glasgow, il y a présenté un plan de 1 milliard de dollars dans un projet de muraille verte. Problème, comme l’expliquent les Amis de la Terre, il est tout simplement scientifiquement impossible de compenser les 51,17 millions de tonnes de CO2 qu’Amazon dit émettre par an en plantant des arbres. L’intérêt pour Amazon n’est pas là : il est plutôt de faire croire qu’on peut sauver le climat, sans rien changer à ses activités. Et en s'envoyant en l'air dans l'espace : pour 10 minutes là-haut, ce sont 75 tonnes de CO2 par personne, soit plus qu'un milliard d'êtres humains ne dépenseront sur leur vie entière.
En France enfin, le directeur juridique de Totalenergies a été nommé en septembre dernier à la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers par Bruno Le Maire, malgré les alertes répétées sur les mensonges de l'entreprise, et sur l'impact de ses activités sur le climat et les droits humains.
Pour sauver le climat, nous n'avons pas d'autres choix que de couper toute relation dangereuse avec les lobbies des industries fossiles : règles strictes contre les conflits d'intérêt, interdiction des portes tournantes, exclusion des institutions démocratiques ou encore limitation des dividendes. Pour finir ce post, c'est de ces derniers que j'aimerais vous parler : car selon Morgan Stanley, en pleine crise de l'énergie, les multinationales des fossiles pourraient retourner jusqu'à... 45 milliards de dollars à leurs actionnaires ! Preuve s'il en était que les engagements climat ne font pas encore peur aux plus grands pollueurs...